Après quelques semaines hors du pays, nous revenons au Guatemala pour visiter cette fois le sud du pays. Petit récapitulatif d’abord de notre passage, à l’allée, du Mexique au Guatemala, puis de notre visite de la région de Petén, tout au nord.


En avançant vers le Guatemala, on a découvert un soir, en s’arrêtant à La Ventosa au Chiapas, que la chaleur écrasante restait même une fois le soleil disparu. Toute la nuit. Le lendemain matin, à 8 h, c’était déjà étouffant. On s’est dit : ben non, c’est juste une canicule, ça va passer. La météo ne cadrait pas avec ce qu’on avait lu sur la saison. Mais ça n’a pas passé. Tout s’est mis à devenir pénible : rouler, s’arrêter, visiter, cuisiner, manger. Et, surtout, ne pas se laver souvent! Vivre dans une boite de tôle! On s’est renseignés : c’était bel et bien le printemps qui commençait, sans attendre le 21 mars. Imaginez une canicule du mois d’août qui dure… sans arrêt jusqu’en octobre. On nous a expliqué qu’à la mi-mai, la saison des pluies allait commencer et qu’alors l’humidité augmenterait (elle était déjà terrible) et que les quelques brises allaient disparaitre (elles étaient déjà très rares). Youpi. J’avais espoir qu’en atteignant d’autres pays, par exemple le Costa Rica qu’on qualifie « d’éternel printemps », la météo s’améliorerait. En tout cas, pas quand on reste au niveau de la mer.


Tout ça s’est mis à teinter notre voyage. Il fallait se forcer pour aller faire une visite, des courses, n’importe quoi. On était au ralenti, on sautait des étapes ou écourtait des balades. Depuis notre visite de Teotihuacan au Mexique, où on avait dépéri sous le soleil (d’hiver), on avait pris l’habitude d’emporter toujours avec nous des parapluies, qui protègent beaucoup mieux qu’un chapeau et nous évitaitent de toujours nous crémer. On comprenait vraiment toutes les personnes qu’on croisait dans les villages, juste assises devant chez elles à ne rien faire, écrasées par la chaleur. En roulant, en plein vent, on dégoulinait. On cherchait les piscines. (Sans en trouver). Le moteur chauffait tout le temps. On rêvait de découvrir le paradis à la fin d’une journée : une douche. Mais le paradis restait hors de portée.

On a donc passé la frontière du Guatemala à El Ceibo, puis traversé toute une région assez pauvre. Les gens vivaient dans de petites maisons souvent en planches et réalisaient la plupart de leurs tâches quotidiennes dehors : laver les vêtements à la main, aller chercher le bois, cuisiner sur le feu. Ça nous a fait penser aux villages d’antan qu’on a déjà visités, section « installations rudimentaires ». Puis, on a rejoint les villes près du lac Petén Itzá et réintégré le 21e siècle.


Flores


On s’est arrêtés à l’île de Flores, très sympathique et pas mal touristique. Mais la chaleur continuait à rendre pénible chaque étape : trouver à se garer, faire les courses (on restait longtemps collés au comptoir réfrigéré des légumes), déplacer plus loin l’autobus à la demande de policiers, manger, se décider à aller marcher sur l’île. Matteo et Nina n’en avaient pas la force. L’île par contre en valait la peine, pleine de petites rues piétonnes et de végétation colorée. Et on a trouvé du vent! En fait, quand on est dans le bon axe, on reçoit tout le vent du lac et l’île devient vraiment agréable. Le lac était étonnamment haut : quelques rues étaient complètement inondées, mais vraisemblablement depuis un bout de temps. Le soir, on est entrés dans la Réserve de la Biosphère Maya de Petén pour dormir près de Tikal.



Tikal


On peut visiter Tikal à l’aube et voir le soleil se lever sur les ruines : mais le prix d’entrée à cette heure et le guide à payer pour qu’il nous conduise dans la jungle à la noirceur était trop cher pour nous. Même l’entrée normale est très élevée. À 7 h du matin, heure d’ouverture sans le tarif « aube », on était donc aux portes de l’ancienne cité maya, souhaitant éviter la chaleur du milieu de journée et un trop grand nombre de touristes. Les animaux étaient actifs à cette heure : singes araignées, oiseaux, on s’est régalés. Les singes araignées étaient vraiment joueurs, curieux de nous observer et ils se déplaçaient de branches et branches en s’agrippant parfois juste avec la queue.



Contrairement à Teotihuacan, sec et sans végétation sous le soleil, Tikal est enfouie dans la jungle, comme Palenque. Mais encore plus enfouie : certaines constructions, comme le temple dédié aux chauves-souris, sont encore complètement couvertes d’arbres et de terre. Sur tous les côtés, on dirait seulement une grosse colline. Mais quand on prend du recul, on aperçoit soudain au-dessus des arbres le grand panneau sculpté qui chapeaute un temple. On comprend tout le travail qu’ont eu à faire les premiers explorateurs et défricheurs de ces sites : tout nettoyer et reconstruire en entier des escaliers défoncés par la force des racines au fil des siècles.

Quand on monte au sommet du temple le plus haut, on se retrouve au-dessus de la canopée, à pouvoir admirer la jungle jusqu’à l’horizon, d’où dépassent quelques temples mayas. C’est magnifique. Par contre le site manque beaucoup de panneaux explicatifs. Alors le mieux est de suivre dès que possible les guides et leurs groupes. Ainsi, on a compris qu’une place centrale entourée de ruines indistinctes était en fait un ancien jeu de pelote, avec les chambres des joueurs, et tout près un alignement de sept temples qui recevaient chacun la lumière du soleil par leur ouverture centrale à un moment précis de l’année, entre autres aux solstices et aux équinoxes.




Castillo de San Felipe


Après Tikal, changement de style et d’époque : on est allés visiter le Château de San Felipe, à l’entrée du lac Izabal, qui donne sur le Golf du Honduras et la mer des Caraïbes. C’était aux 16e et 17e siècles un port très fréquenté pour le commerce de toutes sortes et d’où les bateaux espagnols rapportaient l’or qu’ils allaient chercher à Antigua, à 300 km ou 40 jours de charrette. Donc, un spot à pirates. Ces derniers ont tenté d’attaquer la forteresse à plusieurs reprises, et ils ont parfois réussi, mais elle leur a toujours été reprise par les Espagnols et reconstruite ou consolidée.



Le Castillo est un vrai petit château défensif, avec douves (remplies de crocodiles à l’époque), pont-levis, canons, mirador et prison. Cette dernière était assez impressionnante. Une dame qui visitait avec nous n’a pas voulu passer par le petit couloir sombre pour y accéder ni entrer dans la grande salle obscure. De quoi rebuter les claustrophobes. Pas d’aération, pas de fenêtres évidemment, qu’une douzaine de micro cellules en alcôves placées en demi-cercle autour d’un espace central (mais qui ne servait pas à la vie commune). C’était humide et étouffant. Les prisonniers vivaient à deux dans ces cellules, sans lumière. Dans chacune, une banquette de pierre pour deux personnes assises, sur laquelle il était impossible de s’allonger entièrement. La grille de chaque cellule était à 1 m environ de la banquette (aujourd’hui les grilles ont disparu). Rien d’autre. Ah oui! À la saison des pluies, l’eau passait par-dessus les remparts du château côté lac et envahissait la prison au sous-sol sur plusieurs centimètres. Debout, les prisonniers en avaient jusqu’aux genoux; assis, jusqu’à la taille. Une partie du corps constamment immergée dans l’eau croupissante, en pleine obscurité, ils attrapaient des tas de maladies. Il n’y avait pas de toilettes.   



On s’est sentis dans Pirates des Caraïbes ou, dans les endroits aérés et plus clairs, dans un château Lego. Il faisait toujours affreusement chaud, mais un gardien du site nous a offert quelques noix de coco.


Quirigua


Avant de quitter le pays, on s’est arrêtés brièvement à Quirigua, au milieu des plantations de bananes. Le site est petit, l’humidité à son maximum, la pluie intermittente. On hésite à y aller : d’un côté, c’est un site UNESCO, on est sur place, de l’autre, ça semble surtout intéressant pour des spécialistes capables de déchiffrer les grandes stèles bien conservées. Des touristes qu’on croise nous confirment que le site n’est vraiment pas à la hauteur de Tikal ou de Copán.



J’y vais quand même avec Matteo et Nina. C’est vrai que les stèles sont les plus hautes que j’ai admirées (deux à trois mètres) et que les hiéroglyphes mayas sont très clairs, mais il manque d’explication pour qu’on les « lise » un peu. Bientôt, les moustiques s’en mêlent. On est tellement attaqués que les enfants doivent faire la vigie autour de moi dès que je m’arrête deux minutes leur lire un des rares panneaux d’interprétation. Finalement, on a préféré le petit musée de jade à l’entrée, où on voyait des répliques de crânes portant des pierres de jades incrustées dans leurs dents.




Guatemala city


Le Guatemala qu’on a retrouvé à notre retour avait un tout autre visage. D’abord, on était presque toujours en hauteur, autour de 1600m (à Guatemala City, à Antigua et au lac Atitlán), ce qui fait que le temps est enfin devenu frais. On n’avait pas connu ça depuis longtemps (sauf sur le volacan Irazú au Costa Rica). Ensuite, on aurait dit un autre pays tellement le taux de développement et la richesse apparente étaient extrêmement différents du nord, particulièrement à Guatemala City.

Ce n’était pas notre intention de nous arrêter dans la capitale mais on s’est retrouvés coincés dans le trafic entourant la ville en fin d’après-midi, sans trouver d’endroit où nous arrêter dormir. À chaque instant, le trafic s’intensifiait, on n’avançait presque plus. Il n’y avait aucune voie de contournement. On a essayé un embranchement pour aller dormir dans un stationnement de centre commercial : on se serait cru aux États-Unis. Il y avait plein de boutiques et restos nord-américains ou européens, tout un aménagement paysager, un gardien qui est venu nous dire qu’on ne pouvait pas rester garés là. On est repartis, à nouveau coincés dans la circulation à côtoyer des autobus de la ville qui sont en fait des autobus scolaires pimpés, encore plus colorés qu’au Nicaragua. Couleurs rutilantes, lumières flashantes, 10 vitesses manuelles (cinq pour les hautes vitesses, cinq pour les basses), injection accrue d’essence dans le moteur pour accroitre la puissance (et du même coup la grosse fumée noire derrière), nom de chaque bus peint sur la vitre arrière, Jessica, Monica, Pamela, qui nous doublaient comme si de rien était dans les montées. Les chauffeurs rigolaient en nous croisant et en découvrant qu’on était une maison! Nous, on rigolait moins. On a passé 4 h à rouler en escargot juste pour traverser la ville. À 21 h, on a réussi à s’arrêter, à souper, pris encore pour se redéplacer à la demande de gardiens.


Antigua


Le lendemain, on est arrivés à Antigua, l’ancienne capitale du Guatemala, qui nous a vraiment charmés. On aurait entendu parler d’une maison à louer pas cher, d’un emploi temporaire à occuper, on aurait signé. La ville est très belle, pleine d’anciennes églises ou de monuments de l’époque coloniale, avec toutes ses rues en pavés. Il y a toujours quelque chose qui sort de l’ordinaire à regarder. Les bâtiments sont bas, en général à un seul étage, et on voit de presque partout les montagnes environnantes et parfois le volcan  fumer. Il y a quand même pas mal de touristes, mais l’endroit garde son charme et son air authentique. De nombreux hôtels, auberges, agences proposant des tours sont installés dans d’anciennes grandes villas avec cour intérieure : on se promène dans une rue, le long des murs avec peu de fenêtres, et soudain par une ouverture on voit un oasis de verdure, tables, coussins, fraicheur. Même le McDo (eh oui) est beau. On y est entrés, cherchant un coin où trouver internet, pour découvrir une immense cour intérieure, des fontaines, un grand jardin genre Santropol ou café Touski, des banquettes coussinées, un plafond de bois.   



On s’est beaucoup promenés dans les rues. On a vu l’arche du couvent de las Capuchinas, un ancien passage couvert emprunté par les moniales pour « traverser » la rue de leur couvent à l’église. À proximité, un chocolatier français nous a parlé de sa vie à Antigua et on s’est laissé tenter par ses délicieux chocolats (au jalapeño, au romarin). Dans une église proche, une famille maya remontait toute la nef à genoux, murmurant des prières, aussi imprégnée de religion catholique qu’à l’époque des dieux mayas. On est entrés dans des endroits inspirants, une crêperie avec terrasse, un espace de travail partagé (terrasse sur le toit, tables de travail, poufs, cuisine avec micro-ondes et frigo, où on identifie la bouffe perso ou à partager), un musée du livre ancien.



Les rues sont petites pour se garer, mais le service de police met à la disposition des voyageurs en VR un immense terrain entouré de murs de pierres au centre de la ville. C’était parfait. Un genre de terrain de camping sans service, mais avec toujours un policier dans la guérite d’entrée et d’autres voyageurs avec qui échanger. Les enfants étaient au paradis. Au fond du terrain, là où les parents ne pouvaient pas les voir, ils avaient des tas de cachettes, d’arbres ou jouer, d’anciens escaliers ne menant nulle part où discuter. On ne les a pas beaucoup vus. Quand ça a été le matin du départ, encore moins : on a fini par les rapatrier, dire au revoir, amorcer la manœuvre de sortie en direction du garage où on allait faire le changement d’huile.


À Antigua, les rues sont assez étroites et l’entrée du terrain de police l’était tout autant. Ça passait juste. Déjà, on était entrés à reculons. Les autres familles (des Français, des Argentins) sont venues assister à notre départ : à un moment, on est devenus trop nombreux à essayer de guider Steph, qui ne nous entendait pas avec le bruit du moteur. Le mieux dans ce temps-là est de frapper sur le bus, ça s’entend même de derrière. Bref un poteau servant à tenir la corde pour attacher la barrière d’entrée s’est fait un peu plier par nous : le policier était vraiment mécontent. Dans la cohue, j’ai essayé de lui faire comprendre qu’on ne partirait pas comme ça. Steph a continué vers le garage, tandis que je laissais mon passeport en garantie de notre retour et allais rejoindre un des Français, François, parti à la recherche de quelqu’un pouvant faire la soudure.


Le bris n’était pas grand-chose, mais ça ne s’est pas réglé rapidement pour autant. On a trouvé un soudeur, oui, mais qui n’avait pas les bons outils, pensait travailler sur du 220 quand seulement le 120 volts était disponible, bref il fait la réparation, mais à la fin, la prise de courant sur laquelle il s’était branché a commencé à prendre feu. Fin abrupte de la soudure, double mécontentement des policiers : ils voulaient qu’il finalise la soudure et qu’on répare leur prise maintenant hors d’usage. Entretemps, Steph était revenu du garage, où on n’avait pas pu le prendre. Il s’est mis dans l’électricité avec François et Cédric. J’ai réussi à convaincre les policiers que la soudure tenait. Mais tout ça a pris des heures : c’était rendu le temps de l’apéro.



On a décidé de rentrer le bus, que Matteo et moi on guidait cette fois de plus près et de partager un repas toutes les familles ensemble. Le lendemain, on était inquiets de la sortie, mais elle a été impeccable.



Lac atitlan


Dernier arrêt du Guatemala, on s’est rendus au Lac Atitlán, un très beau lac entouré de montagnes et de volcans. Encore un endroit où rester, coudonc. On a pris le bateau, traversé le lac, visité la petite ville de San Juan, vraiment sympathique. Le Guatemala aura décidément été dans nos must.


Caroline


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