Inscrit au Patrimoine de l’Unesco, Yellowstone est un parc unique en son genre et gigantesque (comparable à la Corse et un peu plus petit que l’Estrie). Il contient les deux tiers des geysers de la planète – et d’ailleurs, des geysers qu’on peut approcher, il n’y en a pas tant dans le monde. À cause de ça, trois millions de visiteurs s’y présentent chaque année. Va trouver un camping là-bas, ou un peu de tranquillité!


Yellowstone, c’était donc pour nous à la fois inusité et décourageant. Inusité parce que le parc est beau, étonnant, par exemple Grand Prismatic de soir en valait vraiment la peine, les couleurs de l’eau reflétaient celles du soleil couchant et on s’est retrouvés seuls à admirer l’ensemble. Décourageant parce qu’il n’y avait plus de petites routes où se cacher la nuit et on devait faire un kilométrage débile pour seulement dormir le soir, et rentrer dans le parc le matin, donc on ne pouvait plus partir en randonnée à 7 h le matin ou finir toutes nos activités à 21 h. On a dû visiter Old Faithful, le geyser phare du parc, au milieu de la cohue et sous le soleil de midi. Ça gâche un peu le truc.


On aurait aimé voir d’autres geysers, plus retirés, les admirer plus tranquillement, mais leur jaillissement est moins prévisible que celui d’Old Faithful, alors on ne voulait pas dépenser des heures de routes ou de randonnées pour une éventualité moins sûre. Les sources colorées d’eau chaude nous ont impressionnés davantage que le geyser qu’on a vu. En fait leur eau est limpide, mais ce sont les micro-organismes qui y vivent (algues, champignons, bactéries) qui leur donnent leur couleur, chacun réparti selon la chaleur de l’eau qui leur convient. Ils forment ainsi une sorte de thermomètre coloré.



Yellowstone possède la combinaison rare de trois éléments indispensables aux sources d’eau bouillonnantes et aux geysers : un sous-sol volcanique, avec des mouvements de lave actifs; une hydrographie abondante; une activité sismique importante, qui entretient les failles rocheuses par où l’eau chauffée par la lave s’engouffre et jaillie sous la pression. En marchant, je pensais à Lewis et Clark, les explorateurs envoyés par Jefferson au début du 19e siècle, me demandant comment ils avaient perçu cet endroit, s’ils croyaient au début à des feux allumés un peu partout, car de loin, on dirait constamment des colonnes de fumée dans la forêt, s’ils avaient essayé de toucher l’eau chaude, compris ce qui se passait, je pensais aussi aux bouillonnements souterrains des Enfers, imaginés par les Grecs dans l’Antiquité, pendant que je côtoyais les zones sèches, dévastées, presque lunaires laissées par le passage des eaux – des arbres morts partout et du stucco au lieu de l’herbe.




Donc un coin remarquable (notamment Lower Falls et Yellowstone Lake, où les enfants se sont baignés (2357 mètres!)), mais que des millions de gens remarquent eux aussi chaque année. Pour le contact privilégié avec la nature, on repassera… en novembre.

Caroline